vendredi 29 juillet 2011

Le droit d'auteur pour les nuls

Avant de faire quelques articles sur le droit d'auteur, il me paraît important de bien expliquer ce que c'est.

Copyright

En anglais "copyright" signifie le droit de copier.

Avec l'invention de l'imprimerie, n'importe quel imprimeur pouvait produire n'importe quel livre. Or pour avoir quelque chose à imprimer, il fallait que des auteurs pondent du texte intéressant. Or il faut que l'auteur puisse se concentrer sur ses écrits sans avoir à chercher comment vivre.

Or si un imprimeur achète un manuscrit, il peut rapidement être rapidement concurrencé par un autre.

Vu les petits tirages et les circuits réduits de distribution de l'époque, l'invention d'un droit exclusif à la copie, semblait tout à fait judicieux.

A l'ère de l'informatique, chaque ordinateur est fait pour copier. En une simple combinaison de touches (ctrl-C ctrl-V) n'importe quel document, n'importe quel image, n'importe quel film peut être copié plusieurs dizaines de fois en quelques centièmes de secondes. Et le pire étant que chaque mois, ça va de plus en plus vite.

L'HADOPI porte en elle-même son échec : vouloir empêcher à des ordinateurs de copier, est absurde.

Le dramatique droit d'auteur

Le droit d'auteur français, c'est d'abord vu appliquer au théâtre, où les auteurs avaient du mal à se faire rémunérer, mais aussi, où une pièce pouvait facilement se faire voler par une autre troupe. De nos jours, encore, un auteur peut décider de bloquer une pièce dans toute une région : le spectateur est alors obligé de voire la pièce jouée par la troupe qui en a l'exclusivité. Si vous êtes une troupe associative, mieux vaut être au courant de ce genre de chose avant de commencer à apprendre un texte.

Les défenseurs du droit d'auteur français affirme qu'il est meilleur que le copyright anglo-saxon parce qu'il a des droits inaliénables ; ce sont les droits moraux qui sont au nombre de quatre :
- le droit de divulgation : le droit de communiquer l'œuvre au public est décidé par l'auteur seul, dans des conditions qu'il aura choisies. Cependant, cette prérogative s'épuise lors de son premier exercice ;
- le droit de paternité : l'auteur a droit au respect du lien de filiation entre lui et son œuvre ;
- le droit au respect de l'œuvre
- le droit de repentir : l'auteur peut retirer l'œuvre du circuit commercial, même après sa divulgation.

Le droit de repentir est potentiellement très abusif.

Dans SACEM, il y a auteur, compositeur, mais surtout éditeur

La société des auteurs, compositeur et éditeur de musique, et en charge de la collecte des droits d'auteurs, auprès des radios, des télés, et de tout un tas d'autres intermédiaires.

Selon la légende, Ernest Bourget, Paul Henrion et Victor Parizot, compositeur, parolier et éditeur "connus" (tellement "connus" qu'ils n'ont pas de page Wikipédia !), refusèrent de payer leurs consommations dans un café qui jouait leur musique, estimant qu'ils ne devaient rien puisque le propriétaire de l'établissement utilisait leurs œuvres sans les rétribuer en retour. Les trois compères gagnèrent un procès, qui provoqua, en 1850, la naissance d'un syndicat des auteurs ancêtre de la SACEM.

C'est d'ailleurs l'éditeur qui finança le procès. Grâce à de forts appuient politique, ils purent renforcer le droit d'auteur d'un point de vue juridique.

Notez qu'en matière de musique, ce sont surtout les éditeurs qui sont riches, très rarement les auteurs, les compositeurs, et encore moins les interprètes. Ceci vient bien entendu du nombre de personnes dans chacun de ces groupes. L'éditeur (souvent producteur) est celui qui a l'argent et sait vendre. Contrairement aux autres qui changent tout le temps, l'éditeur peut asseoir ses relations et réellement vivre de son activité. A contrario, les auteurs, les compositeurs et les interprètes peuvent plus facilement se faire avoir, car ils sont souvent nouveaux dans le métier.

D'ailleurs récemment nos parlementaires ont adopté une modification de la loi qui diminue de moitié la prescription des droit d'auteur perçue, modification validée par la SACEM. Ainsi l'argent perçu et non réclamé, appartiendra plus vite à la SACEM : comme c'est beau !

Le droit d'auteur est un concept tiré par les cheveux

Lorsque vous écoutez le dernier Johnny Hallyday chez votre coiffeur, sachez que celui qui a pressé le disque a payé une "taxe" à la société pour l'administration du droit de reproduction mécanique, avant de le donner à son éditeur, qui après avoir pris ses marges l'a vendu. La radio qui l'acquière en a sûrement fait une copie sur un CD vierge ou un disque dur sur lesquels chacun paie une taxe sur les supports vierges. En étant diffusé par les ondes, la radio paie une taxe à la SACEM. Et votre coiffeur lui-même paie une taxe, pour vous-même mais aussi en fonction du nombre de ses employés.

L'indépendance de la SACEM défendue bec et ongles

Tous ces organismes d’extorsion de fond n'aiment pas qu'on appelle leur ponction financière "taxe" car une taxe doit être prélevée par l'état. Mais comment appeler un prélèvement obligatoire dont un organisme a le monopôle garanti par la loi ?

La cour des comptes commence tout de même à avoir un droit de regard très limité sur ce qui se passe à l'intérieur de la SACEM. Les premiers constats sur le peu qu'elle voit n'est pas glorieux : une myriade d'organisme de prélèvement qui se refacture entre eux. La SADRM par exemple, n'a pas d'employés, seulement un conseil d'administration dont les membres sont en fait les mêmes que la SACEM.

Pourtant le droit d'être contrôlé a été dur à obtenir, et a coûté son poste à la ministre de la culture de l'époque.

Références : La commission permanente de contrôle des sociétés de perception et de répartition des droits

Droit d'auteur, vie privée, secrets commerciaux et industriels

Autrefois, la SACEM collectait la taxe des timbres sur les partitions : les chanteurs de rue distribuait des partitions à ceux qui chantait avec eux. Il n'y a pas de petits profits à la SACEM.

Aujourd'hui encore, les agents assermentés de la SACEM s'accordent le droit d'interrompre un cour de musique au conservatoire pour fouiller les sacs des élèves à la recherche de partitions photocopiées sans timbres. Même la police n'a pas le droit de fouiller votre sac personnel : seuls les agents des douanes et la SACEM le peuvent.

Autre droit disproportionné : la SACEM se fait communiquer le chiffre d'affaire de tous les bars et discothèques par le FISC : un droit dont rêvent tous les journalistes pour inspecter le train de vie de nos politiques. Mais la vie privée et le secret industrielle de certains semblent plus important que ceux d'autres.

La SACEM et le cinéma voulait interdire les cassettes audio et les magnétoscope. Mais on se heurte rapidement à des problèmes de vie privée. Accepteriez-vous qu'un agent débarque chez vous à n'importe quelle heure pour vérifier vos enregistrements ? Va-t-on arriver à écouter toutes les conversations téléphoniques parce que potentiellement vous pouvez siffloter un air de musique au téléphone ? Pourtant c'est ce que fait HADOPI : une surveillance généralisée de la population française.

Droit d'auteur et le droit à l'expression

Le droit d'expression ne sert à rien si personne ne peut vous écouter. En voulant couper Internet, HADOPI et les éditeurs de musiques s'accorde le droit de couper le droit d'expression et d'information de n'importe qui. Dans un proche avenir, on imagine qu'il sera facile d'identifier l'auteur d'un blog très gênant. Il sera alors très facile de couper l'accès à lui et à ses amis proches (merci Facebook).

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