lundi 26 septembre 2011

Bio et lobbying

Je m'étonne toujours de trouver des produits bio dans des contenants en plastique. Ceux qui achètent du bio, le font normalement parce que ce type de culture a moins d'impact sur l'environnement et que le produit alimentaire contiendra moins de produits nocifs.

Or les emballages plastiques ne sont pas biodégradables et difficilement recyclables. C'est dommage de cultiver propre pour emballer salement.

Les emballages plastiques peuvent contaminer les aliments. D'ailleurs nous sommes tous soumis à des doses continues de Bisphénol A. Ce perturbateur endocrinien est présent partout et pénètre par les aliments et la peau. Cosmétiques, jouets, emballages alimentaires, tickets de caisse, vêtements, il est partout. Il est particulièrement présent dans les plastiques transparents. Plus le plastique est rigide, plus il y en a.

Donc si vous achetez bio, préférez des emballages en verre.

M'étant fait ces réflexions, je décide de chercher un peu ce qui se raconte du côté des anti-bio.

Je tombe rapidement sur Gil Rivière-Wekstein.

C'est visiblement un invité fréquent des diverses émissions pour prôner une vision anti-bio :
- Arrêt sur Image
- Europe 1
- sur tv agri

Mais là, un doute m'étreint : ses arguments me rappelle furieusement une émission américaine : Penn & Teller.

Penn & Teller : l'émission d'infotainment "Bullshit!"

"Emission d'infotainment" signifie "émission d'information et de divertissement à la fois".

Penn & Teller sont deux magiciens de Las Vegas qui ont fait une série d'émissions nommée "Bullshit!". Elle est forte intéressante, car sans détour de langage nos deux magiciens présentent ce qu'il considèrent comme des grosses "conneries" (bullshit en VO).

Tant qu'ils s'attaquent aux séances de spiritisme, nos deux compères sont dans leur domaine de compétence : ils vous expliquent les méthodes des mentalistes, qui ne sont qu'une partie du monde de la magie. Ils dénoncent ceux qui font passer pour vrais des trucs de magicien.

Malheureusement, Penn & Teller sont aussi très engagés politiquement, à tendance libertarien : ils prônent le non-interventionnisme extrême de l'état, et la liberté économique et morale. Ils sont pour la dépénalisation de toutes les drogues, y compris le tabac.

Or être écologiste c'est prôner l'intervention de l'état en matière d'environnement. Ainsi ils se sont "moquer" des sujets suivant :
- "Being Green" où ils dénigrent le recyclage et les verts, faisant entre autre signer à des activistes verts, une pétition interdisant le monoxyde de dihydrogène (c'est à dire l'eau)
- "Global Warming" où ils dénigrent les théories sur le réchauffement climatique
- "Endanger Spicies" où ils dénigrent la protection des espèces en voie de disparition

L'émission à laquelle, je m'a fait pensé Gil était intitulée "Organic Food" (Nouriture Bio), tous simplement.

Quels étaient les arguments de Penn & Teller ?

Selon eux, ceux qui achètent le Bio le font pour les raisons suivantes :
- l’environnement
- la santé (moins de pesticide)
- les qualités nutritives
- le goût
- les petits fermiers locaux

Ils nous expliquent ensuite pourquoi ils pensent que c'est faux.

Là dessus ils opposent qu'on ne pourra pas nourrir la Terre entière avec des méthodes d'agriculture bio.

Ils oublient de dire que leurs "experts" sont payés par un institut financé par entre autre Monsanto.

Autant pour la magie, nous pouvons faire confiance à Penn & Teller. Mais pour leur indépendance politique face au lobbys, nous pouvons leur faire confiance : ils ne vont dire que des conneries.

Gil Rivière-Wekstein

Que dit Gil Rivière-Wekstein ? Prenons, par exemple dans son interview pour enquête-débat.fr.

En résumé, selon Gil, les fausses promesses du Bio sont que le bio est :
- meilleur pour leur santé
- meilleur pour l'environnement
- bon pour le petit agriculteur local

Il nous explique ensuite pourquoi ce sont de fausses promesses.

Entre autre, il utilise l'argument que la culture bio utilise des pesticides.

Sur son propre site, "Agriculture et Environnement", il affirme qu'on ne peut pas nourrir la Terre entière avec de l'agriculture bio.

Dans l'émission d'Arrêt sur Image, il aborde le thème du goût des aliments bio.

Mince, dans tous les cas, ce sont précisément les mêmes arguments que Penn & Teller pour contredire les amateurs de bio ! Il y aurait des origines communes ?

Cherchons à savoir qui est Gil qui semble se présenter comme journaliste. Nous apprenons qu'il n'est pas réellement Journaliste. Il est membre de l'association française des journalistes agricoles (AFJA), mais être membre de cette association n'en fait pas pour autant un journaliste.

Le Canard enchaîné le présente comme un lobbyiste des fabricants de pesticides et d’engrais.

Autre fait amusant : ses livres sont en fait auto-édités au travers du site Les Publieurs.fr :
- Les Abeilles, l'imposture
- Bio : fausses promesses, vrai marketing

Agriculture et environnement est une lettre d'information mensuelle qui souvent n'a qu'un édito et quatre articles.

Encore une fois, dans l'émission d'Arrêt sur Image, Gil prétendait que le bio était une cause possible de l'épidémie d'E.coli cet été. Pourtant des études mises en avant pour appuyer cette théorie ne sont que des rumeurs inventées par des lobbyistes américains.

D'ailleurs la lecture entre les lignes de présentation neutre ou élogieuse du personnage laisse imaginer la réalité. M. Gil Rivière-Wekstein a tout du profil du lobbyiste et du communiquant (pour qui ?).

L'article de Slate

Sur Slate.fr, même lobbying : le soja bio pour nourrir nos vaches bio viendrait de Chine ! Nous nous retrevons comme dans Penn et Teller, avec la même histoire de fantôme chinois comme origine des produits bio mondialisés, avec en fond le scandale de la mélanine.

Mais il semble qu'en réalité, très peu de produit bio vienne de Chine. L'article saute aussi de but en blanc, sur les framboises pas bio ; quel rapport ?

Nous tombons sur les fruits importés par avion : le fret par avion est très cher. Il est réservé au transport des denrées périssables (et chères).

En fait, les parts par type de transport en France sont (fleurs et nourriture) :
- 1,27 million de tonnes/an par avion
- 197 millions de tonnes du trafic routier
- 218 millions de tonnes du maritime
- 19 millions de tonnes du fluvial
- 17 millions de tonnes du ferroviaire

Pourquoi prendre l'avion, quand il est largement plus rentable d'utiliser des bateaux de fret.

Comme pour tout réseau (comme par exemple, Internet, le courrier), les grandes lignes de transport (les back-bones pour Internet) sont déjà les plus optimisés : leur coût de revient est négligeable par rapport au reste du réseau. Le fret maritime ne représente que 2% des émissions de gaz à effet de serre. Quant aux transports locaux, il s'intègre dans des transports de nourriture qui voyagerait de toute façon.

Or une étude suisse semble démontrer que le bilan carbone sucre de canne et meilleur que celui du sucre de betterave, malgré le transport. (autre article ici)

Il y a effectivement des améliorations possibles en France, sur le transport ferroviaire, mais l'absence de concurrence et l'excès de syndicalisme des travailleur bloque son développement.

Conclusion

Malgré certains arguments de M. Gil Rivière-Wekstein qui semblent pertinents, il prône l'utilisation de pesticides et d'engrais sans restriction. Or ce que tend à montrer un film comme "Notre poison quotidien", ce sont les conflits d'intérêt de ceux qui valident les pesticides. Ce film montre aussi que les concepts qui entourent la vérification de la dangerosité des pesticides n'a pas évolué malgré des découvertes et des remises en cause de ceux-ci.

Certes, nous vivons plus longtemps, mais ça a été toujours au prix de normes sanitaires toujours plus strictes, et de progrès médicaux en parallèle. Si certains produits sont utiles, d'autres sont réellement dangereux.

La dérégulation en la matière est dangereuse. Nous ne saurions faire confiance en des sociétés étrangères qui semblent bien plus intéressée par leur bénéfices avant l'intérêt général, avant même l'intérêt de certains citoyens de leur pays d'origine.

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