jeudi 22 septembre 2011

"Propaganda" par HADOPI

L'ALPA appelle à voter Sarkozy, uniquement pour sauver HADOPI, et indépendamment de tout ce qu'il a fait. HADOPI sera donc un point important dans la campagne.

Voici que HADOPI nous sert à nouveau une bonne part d'Emma Leprince.


Hadopi expliquée



En passant, celui qui a mis cette vidéo en ligne affirme qu'elle est à destination des enfants, sans doute parce que c'est un dessin animé. Je ne suis pas d'accord car il y a des termes techniques comme WPA et WEP, que des enfants ne vont certainement pas comprendre.

Selon ces spots, plein d'artiste ne pourront pas créer sans HADOPI. C'est magnifique de voir que le budget faramineux de la HADOPI sert à justifier l'utilité de sa propre existence. Comme le dit la blague sur le travail : 20% du temps est du travail réel, 80% faire savoir qu'on a travaillé (à moins que ce soit 5% et 95%...).

Voyons en quoi HADOPI aiderait la création...

Emma Leprince ou la cas de la musique

"Artiste + Œuvre = Travail" : Bizarre comme équation. Le "égal" est proprement faux, car a la fin l'artiste est toujours là. J'aurais plutôt dit "Artiste + Travail = Artiste + Œuvre". Et encore, l'opération n'est pas réversible. Il vaut mieux utiliser autre chose : "Artiste + Travail --> Artiste + Œuvre"

Donc un artiste c'est comme un docteur, un boulanger ou un ingénieur. Sauf que la méthode de paiement n'est pas la même. La comparaison s'arrête assez vite. A moins que HADOPI ne prône ce que veulent le américains : que les artistes soient payés à la prestation par le producteur-éditeur, et que ce soit lui qui touche toutes les royalties. Dans ce cas-là, oui c'est pareil.

Mais on apprend tout de même qu'être artiste, c'est bien plus cool que tous les autres métiers. Notre jugement de valeur n'est clairement pas le même. Est-ce très enviable de mourir d'overdose étouffé dans son vomi, ou d'arrêt cardiaque.

"Tout travail mérite salaire." La bonne expression. Donc on passe d'idées de droite ultra libérale, à la très marxiste valeur-travail. Rappelons que les pires contrats de travail sont ceux des artistes. C'est bien de défendre le salaire des artistes, mais il faut commencer par leur donner plus de garantie et de stabilités dans leurs contrats de travail, surtout quand ce sont plus des techniciens que des artistes à part entière. Par exemple, les standardistes de TF1 sont embauchés avec des contrats "artistes". Le contrat artiste permettant à l'employeur de virer l'employé sous prétexte d’insuffisance artistique (un critère non objectif), c'est le contrat le plus instable en France.

Ensuite, on nous présente "la chaîne de la création". Le mot "chaîne" fait plus penser à un système industriel qu'artistique. Il y a en effet des prestataires techniques autour de la musique, de la télévision et du cinéma. Mais les producteurs sont les premiers à ne plus les utiliser, dès que la technique le permet. Par exemple, la réduction de la taille des caméras et des micros, permet d'utiliser moins de personnel. Les autres intermédiaires, ce sont les réseaux de distribution. Mais comme l'eau en bouteille, l'eau du robinet coûte moins chère. Internet distribue de manière moins polluante les films, la musique et les jeux-vidéo. Il y a des métiers qui disparaissent (comme libraire, disquaires) et d'autres qui se créent. C'est la vie.

Visiblement, le seul moyen de rémunération des artistes, c'est nous quand on achète un album... Sauf que c'est faux. Quand on regarde bien la répartition du prix d'un album, on a dans l'ordre des tailles :
- l'éditeur-producteur
- le réseau de distribution
- l'état (TVA)
- le ou les artistes

Et encore, quand l'éditeur ne facture pas à l'artiste, la photo de la couverture de l'album, le vidéo-clip, les CD promotionnels, et tout ce qu'on peut inventer, il a peut-être l'espoir de toucher quelques centimes, quand il vend un million d'album en étant auteur-compositeur et interprète.

Heureusement qu'il y a les concerts où l'artiste est payé directement à chaque concert. C'est sa notoriété qui fait alors sa valeur. L'artiste a largement intérêt à ce qu'un maximum de gens écoute sa musique, même gratuitement, pour pourvoir s'attirer plus de monde à son concert et se garantir de meilleurs cachets.

Sachant que le système de distribution actuel rapporte beaucoup au réseau de distribution et très peu (ou vraiment rien) aux artistes, la distribution totalement gratuite sur Internet semble être une alternative plus qu'acceptable.

On nous dit ensuite que l'artiste devrait pouvoir choisir de ne pas diffuser gratuitement ses œuvres. Il y a là un grave mensonge. Car un artiste inscrit à la SACEM, n'a pas le choix ! La phrase sous-entend que l'artiste peut choisir l'inverse, c'est à dire de diffuser gratuitement ses œuvres par Internet. Or la SACEM lui interdit même de mettre des morceaux sur son blog ! A partir du moment où vous êtes inscrit à la SACEM, toutes vos œuvres sont soumises au bon vouloir de la SACEM. Et même si vous n'y êtes pas, elle collectera tout même vos royalties, et se les mettra discrètement et légalement dans sa poche, si elles ne sont pas réclamée.

Note de dernière minute : la SACEM s'apprête à accepter les licences Creative Commons !

Ensuite, on nous rappelle que les artistes nous émeuvent et qu'on les aiment. Pour ma part, c'est faux : c'est leur musique qui me plaît. Les artistes eux-mêmes sont parfois pédophiles, drogués, préfèrent les hommes, appellent à voter Sarkozy, paient leurs impôts en Suisse, font plein de choses détestables. Je n'en connais pas personnellement, mais ils sont sans doute très détestables pour la plupart. Il ne faut pas confondre, l'acteur et son rôle, le chanteur et sa chanson. Le fait qu'il chante bien ne pardonne en aucun cas ce qu'il peut faire de mal par ailleurs.

Conclusion du spot : grâce à HADOPI, Emma Leprince pourra composer sa chanson en 2022. Ben en fait je ne vois pas le rapport : elle pourra toujours composé sa première chanson, avec ou sans financement. Ni HADOPI, ni la SACEM, ni tout autre organisme représentant les artistes n'a aidé qui que ce soit à prendre des cours de musique et de chant, pour composer une première chanson, surtout la première !

Tue-moi à Gage ou le cas du cinéma

Le cinéma a un système de distribution particulier, puisque les films sont d'abord distribués en salle, puis en vidéo sous différents formats, avant de passer à la télévision.

Notez que le dernier format de diffusion est gratuit. J'inclue d'ailleurs le dernier format de diffusion : le streaming gratuit rémunéré par la pub.

Mais revenons au premier : le confort d'écoute et de vision dans un cinéma n'a rien à voir avec celui qu'on a chez soi. Malgré l'inutilité de la HADOPI, jamais les gens ne sont autant allés au cinéma. Chaque année depuis 10 ans, le record de fréquentation des films est battu, et ce n'est pas un phénomène isolé dû au "Ch'ti" : les gens ont vraiment envie d'aller au cinéma, peu importe le film.

J'aurais même tendance à dire que c'est grâce au téléchargement que les gens ont pris goût au cinéma. La baisse de leur budget en cassette-vidéo et DVD sans diminuer leur consommation de vidéo, a permis de dégager de l'argent de toute façon alloué au loisir. Car le budget loisir des ménages ne monte pas ni ne baisse. Un téléchargement illégal n'est pas une vente en moins, c'est en fait un achat qui est reporté ailleurs. C'est ce que n'ont pas compris les défenseur de la loi HADOPI. Au lieu d'acheter des disques, les gens vont aux festivals de musique et aux concerts. Au lieu d'acheter des DVD, les gens vont au cinéma ou au théâtre.

La consommation gratuite de vidéo, donne envie d'aller au cinéma, ce qui crée un cercle vertu, entre le cinéma et le téléchargement.

Le pire dans ce système, c'est que les majors l'ont compris : elles ont inventé les contrat "360°" qui inclut une part sur les cachets des artistes lors des concert.

Ensuite nous apprenons que PUR signifie "promotion des usages responsables". Ils parlent aussi de "consommation durable". Ils recyclent des termes de l'écologie moderne qui d'ailleurs n'ont qu'un sens commerciale. Les mots "durable" et "responsable" juxtaposés à n'importe quoi donne une impression d'écolo aux pires choses. Auront-on bientôt du "pétrole responsable" ? Ou du "gâchis durable" ?

Méfiez-nous des sites sans ce sigle... Malheureusement, des sites légaux ont décidé de ne pas afficher ce sigle, car les internautes estiment que c'était une forme de soutien à cette loi débile. Ce n'est donc pas gagné !

Rock Secret ou le cas des séries

Aux USA, le site Hulu.com propose de visionner la plupart des séries télé dès le lendemain de leur diffusion en streaming gratuit et légal.

Beaucoup de web-séries ont vu le jour sur Internet.

Mais il y a aussi "Pioneer On", cette série dont tous les épisodes sont diffusés gratuitement sur Internet. La série est entièrement financée par les dons sur Internet.

Selon HADOPI, le téléchargement affaiblie les libertés des artistes : ah bon ? Lesquelles ? Une liberté est par définition "un droit fondamental". Sauf que le code de la propriété intellectuel, n'est pas dans la constitution. Par contre la liberté d'expression, elle, et une liberté, car c'est un droit constitutionnel. Ce droit n'est absolument pas réduit par le téléchargement et le partage : bien au contraire !

Ensuite, on apprend que les gros protègent les petits. C'est en effet, en faisant croire que certaines lois protègent les petits, que les gros s'en mettent plein les poches. En effet, si une petite entreprise voit un gain après cette loi, une entreprise dix fois plus grosse, verra l'équivalent de dix fois ce gain. Par exemple, HADOPI surveille plusieurs œuvres sur Internet. Or les œuvres des majors, même si ces sociétés sont dix fois plus grosse, le cas particulier des média veut que ces œuvres sont mille fois plus vendues et donc mille fois plus partagée. En faisant semblant de protéger les petits, ce sont les gros qui profitent le plus du système HADOPI.

Ensuite, la HADOPI vous explique que vous êtes responsables des actions d'autrui : une exception dans la loi française ! Ce que les experts des plus grandes sociétés n'arrivent pas à faire, vous devrez en être capable : vous devez protéger votre ligne Internet. Chapeau bas ! Soyez égoïste (et donc de droite) ne partagez pas votre ligne Internet avec votre voisin et les passants dans la rue. Moi, je suis un rebelle écolo (car oui, le chiffrage WEP consomme des cycles de calculs inutilement et consomme donc de l'énergie) : mon accès est sans mot de passe.

Mais surtout, si vous prêtez votre ligne à un ami de passage, selon HADOPI, vous serez responsable de ses faits et gestes : une garantie impossible, car l'espionner un ami ou un membre de votre famille pendant des conversations privées en ligne est tout aussi interdit que le partage de fichier ! Ce genre de problème juridique, se règle en général devant un juge. Il est à espérer qu'il n'y ait pas de juge assez corrompu pour estimer que le droit d'auteur est supérieur au droit à la vie privée, même envers ses parents ou son époux.

En passant, commencez à surveiller ses ados sur Internet, c'est tout un programme !

Les solitudes de Sarah ou le cas des livres

C'est clair, sans HADOPI, Sarah traînera sur Facebook, aura plein d'ami, et sera obligé d'écrire sur son blog "les amitiés de Sarah", recevant le prix Zuckerberg du meilleur blog de l'année.

Avec HADOPI, son accès sera coupé, et elle pourra écrire "Les solitudes de Sarah", recevant le dernier prix littéraire de tous les temps, puisque les livres seront tous remplacés par Internet.

Juridiquement parlant, les "avertissements" sont en fait des punitions, car ils vous font monter d'un cran vers la punition réel. Comme il est quasiment impossible de contester cette montée, le système est illégal. Mais comme pour l'instant, aucune punition n'a été distribuée, tout va bien. C'est le jour où il y aura des coupures d'Internet qu'ils auront des problèmes.

Et encore une fois, personne n'a jamais aidé quelqu'un à écrire son premier livre. Sachant comment vivent les auteurs de livres, au delà des fantasmes : seuls quelques élus peuvent réellement vivre du livre. Internet ne fait que rendre inutile les métiers d'éditeur et de distributeur. Ce sont ces intermédiaire qui vont y perdre le plus, pas les artistes.

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